T. Popoviciu, Notes sur les généralisations des fonctions convexes d’ordre supérieur (IV), Disquisitiones mathematicae et physicae, 2 (1942), pp. 127-148 (in French).
Notes sur les généralisations des fonctions convexes d’ordre supérieur (IV)
PAR
TIBERIU POPOVICIU
(Cluj)
SUR UNE REPRÉSENTATION DES FONCTIONS MONOTONES PAR SEGMENTS
1.
Dans trois notes sur les généralisations des fonctions convexes d’ordre supérieur 1 ) nous avons introduit, en particulier, les fonctions monotones par segments. Il est nécessaire d’abord de rappeller les principales propriétés de ces fonctions.
Une fonction , finie et uniforme sur l’ensemble linéaire est monotone par segments sur si on peut décomposer cet ensemble en un nombre fini de sous-ensembles consécutifs
(1)
tel que sur chaque , la fonction soit monotone.
A une fonction monotone par segments correspondent, en général, une infinité de décompositions (1). Le nombre des sous-ensembles d’une telle décomposition a un minimum . Ce nombre est la caractéristique de la fonction .
Parmi les décompositions (1) nous avons distingué une que nous avons appelé la décomposition canonique de relativement à la fonction monotone par segments. Cette décomposition
(2)
00footnotetext: 1) Note I : Disquisitiones Mathematicae et Physicae, 1, 35-42 (1940).
Note II : Bulletin de la sec. sci. de l’Acad. Roumaine, 22, No. 10 (1940) ; Note III : ibid., 24, No. 6 (1942). Le lecteur est prié de se rapporter à ces notes pour tout ce qui concerne la théorie des fonctions monotones par segments.
a exactement termes et est construit de la manière suivante : est le sous-ensemble de formé par tous les points s tels que soit monotone sur l’intersection de . avec l’intervalle fermé ( ), où est l’extrémité gauche de . L’ensemble se déduit de la même manière de et, en général, de la même manière de ).
2. Soit monotone par segments et (2) la décomposition canonique correspondant. Désignons par les extrémités (gauche et droite) de . On a sauf si est formé par un seul point et alors, évidemment, . D’ailleurs est l’extrémité gauche de et est l’extrémité droite de .
Nous avons défini une suite de nombres propres ou impropres
de la manière suivante : si et si n’appartient pas à et tend vers sur . De même si et si n’appartient pas à et tend vers sur .
Considérons la suite des différences
(3)
et convenons que
lorsque est un nombre fini.
Alors les termes de la suite (3) sont ou bien nuls ou bien ont un signe déterminé. La suite (3) présente donc un nombre de variations de signes.
Nous disons que la fonction est d’ordre ( ) sur .
Considérons une suite finie et ordonnée de , donc . Posons, avec les notations habituelles,
La suite
(4)
présente alors au plus variations de signes. Plus précisément le nombre jouit de la propriété que le nombre maximum des variations de signes de (4), lorsqu’on considère les suites (4) correspondant à tous les sousensembles finis de , est égal à .
3. Une fonction monotone par segments et de caractéristique est au moins d’ordre ( ) et est au plus d’ordre ( ) 1 ). Il existe donc types de fonctions de caractéristique . Ces sont les fonctions respectivement d’ordre . Il est facile de construire des fonctions de chaque type.
Définition 1. Nous dirons qu’une fonction , monotone par segments et de caractéristique , est du type minimum si elle est d’ordre ( ).
Étudions un peu les fonctions du type minimum. Pour cela démontrons d’abord le
Lemme 1. Pour que la fonction soit du type minimum il faut. et il suffit qu’elle soit du type minimum sur chacun des ensembles , ce qui est équivalent’ au
Lemme 1’. Pour que la fonction soit du type minimum il faut et il suffit que la suite
présente exactement variations de signes et ceci pour , .
La condition est évidemment nécessaire car on sait que est la décomposition canonique de . La condition est aussi suffisante. En effet, la suite (5) présente au moins variations. Elle ne peut présenter plus de variations car alors la suite (3) présenterait au moins variations.
Considérons maintenant la suite
(6)
ayant termes. Cette suite peut avoir des termes nuls et des termes d’un signe déterminé, conformément aux conventions du Nr. 2. Deux termes consécutifs de la suite (6) ne peuvent être nuls à la fois. En effet, si , la fonction serait monotone sur ce qui est impossible. De plus
Lemme 2. Si est du type minimum, un terme nul (autre que le premier et le dernier) de la suite (6) est toujours compris entre deux termes de mêmes signes.
Soit, en effet, , alors
00footnotetext: 1 ) L’ordre ( ) est au moins resp. au plus égal à l’ordre ( ) suivant que resp. .
D’après le lemme 1’ la suite
ne peut présenter que l’une des dispositions suivantes de signes
et le lemme 2 est démontré.
Remarquons aussi que
Lommo 3. Si est du type minimum deux termes consécutifs non nuls de la suite (6) sont toujours de signes contraires.
C’est une conséquence du lemme 1’. Plus spécialement du fait que les suites
présentent une variation de signe.
Nous pouvons énoncer maintenant le théorème suivant
Théorème 1. Pour que la fonction , monotone par segments et de caractéristique h, soit du type minimum il faut et il suffit qu’elle soit alternativement non-décroissante et non-croissante sur les ensembles , de la décomposition canonique.
La fonction est non-décroissante resp. non-croissante sur suivant que est positif resp. négatif. De là résulte immédiatement que la condition est suffisante. Les lemmes 2 et 3 nous montrent qu’elle est aussi nécessaire. Pour que le théorème soit toujours exact nous supposons, conformément à l’analyse précédente, qu’une fonction constante (done toute fonction définie sur un seul point) est indifféremment nondécroissante ou non-croissante. Si sur la fonction est constante nous la considérons comme non-décroissante ou non-croissante suivant que sur et elle est non-croissante ou non-décroissante. En d’autres termes nous devons remplacer les termes nuls dans la suite (6) par des signes tels que cette suite présente le nombre maximum possible de variations de signes.
4. Nous allons nous occuper maintenant du problème du prolongement des fonctions monotones par segments. Nous examinerons, en particulier, les prolongements qui conservent l’ordre de la fonction.
Introduisons la définition suivante
Définition 2. La fonction d’ordre ( ) sur est prolongeable sur, l’ensemble si on pout trouper une fonction d’urdre ( ) sur qui coincide avec sur .
Une fonction d’ordre ( ) n’est pas toujours prolongeable. Par exemple la fonction
qui est d’ordre , n’est prolongeable sur aucun point de l’intervalle [ 0,2 ].
Supposons que la fonction soit bornée sur et examinons un prolongement spécial de cette fonction. Définissons la fonction de la manière suivante :
sur .
. En un point de qui n’appartient pas à nous prenons pour l’une des valeurs limite (la limite à gauche ou la limite à droite) de en ce point.
. Si est un intervalle contigu de la fermeture de nous prenons linéairement dans l’intervalle fermé . Si ou est constamment égal à ou dans ou .
Je dis que la fonction a même ordre que la fonction . On voit facilement qu’il suffit de démontrer que l’addition d’un point d’accumulation à ne change pas l’ordre et de même l’addition d’un intervalle contigu à ne change pas l’ordre.
Si nous ajoutons à le point d’accumulation ( n’appartenant pas à ), ce point s’ajoute à un de la décomposition canonique. Le fait que signifie que a été défini comme limite à droite et le fait signifie que a été défini comme limite à gauche. On voit alors que
est une décomposition de . La suite (3) correspondant à cette décomposition est la même que la suite (3) correspondant à la décomposition canonique de . L’invariance de l’ordre en résulte.
Si nous ajoutons à un intervalle contigu ( ), deux cas peuvent se présenter. Ou bien appartiennent tous les deux à un même sousensemble de la décomposition canonique de et alors l’ordre ne change évidemment pas. Ou bien appartient à un et à . Dans ce cas doit être l’extrémité droite de et l’extrémité gauche de . Dans ce cas, la décomposition canonique de étant 1 ).
(7)
La caractéristique de sur est effectivement égale à celle de sur .
pour nous avons la décomposition 1 )
(8) .
La suite (3) correspondant à (8) ne diffère de celle correspondant à (7) que par l’intercalation de deux termes nuls. L’invariance de l’ordre est encore établie.
Nous pouvons donc énoncer le
Théorème 2. Toute fonction d’ordre ( ) et bornée sur est prolongeable (par conservation de l’ordre) sur tout l’axe réel ( ).
Ce prolongement est réalisé par la fonction ).
L’hypothèse que la fonction soit bornée n’est pas nécessaire. Soient toujours les extrémités de et soit l’intervalle d’extrémités et qui est fermé ou ouvert à gauche resp. à droite suivant que resp. appartient ou non à . est facile de voir que nous avons alors la propriété suivante.
Théorème 3. Toute fonction d’ordre ( ) sur et bornée sur tout sous-ensemble complètement intérieur. ) est prolongeable (par conservation de l’ordre) dans tout l’interpalle .
5. Examinons un peu les fonctions définies dans un intersalle .
Définition 3. Nous dirons que la fonction , monotone par segments dans l’intervalle , est normale si les sous-ensembles de la décomposition canonique sont tous des intervalles de longueur non nulle.
Pour une fonction normale nous avons donc
(9)
les étant toujours les extrémités droites des ensembles .
La fonction est donc monotone dans chacun des intervalles
(10)
étant lés extrémités de .
Ici nous supposons que :
. ( ) est fermé ou ouvert å gauche suivant que appartient ou non à .
. est fermé ou ouvert à droite suivant que appartient ou non à .
00footnotetext: 1 ) Qui n’est d’ailleurs pas la décomposition canonique, mais ceci n’a pas d’importance.
2 ) La propriété de est même plus précise. Elle conserve l’ordre ou avec un signe (voir la Note I de cette série). Cette remarque est valable aussi pour le théorème 3.
3 ) est complètement intérieur à si ses extrémités sont des points intérieurs de .
. De deux intervalles consécutifs si le premier est fermé à droite et le second ouvert à gauche et si le premier est ouvert à droite et le second fermé à gauche.
De cette façon (10) est précisément la décomposition canonique de .
Si de plus la fonction est du type minimum, cette fonction est alternativement non-décroissante et non-croissante dans les intervalles (10).
Les points (9) peuvent être appelés les nœuds de la fonction .
Nous avons encore le
Théorème 4. Toute fonction , monotone par segments et continue dans l’interpalle , est normale et du type minimum.
La démonstration est facile et il est inutile de la faire ici. Les nœuds sont des points de maxima et de minima relatifs. En particulier les fonctions continues ayant un nombre fini d’extréma relatifs sont monotones par segments.
Dans le cas des fonctions continues la décomposition canonique est
pour les conventions du plus haut restant valables et les autres intervalles étant ouverts à gauche et fermés à droite.
6. Soit une fonction monotone par segments et normale dans l’intervalle . Soient (9) les nœuds de cette fonction.
Considérons un intervalle qui soit en même temps que ouvert ou fermé aux deux extrémités et soient
(11)
points à l’intérieur de .
L’intervalle peut être, par exemple, l’intervalle lui même.
Soit une fonction continue et croissante, définie dans de manière que
où sont les extrémités de et les extrémités
est normale, de même caractéristique que . Les fonctions sont en même temps du type minimum et en même temps continues. Nous avons aussi
7.
Revenons aux forictions quelconques monotones par segments. Désignons toujours par les extrémités de .
Etablissons maintenant une correspondance biunivoque entre et le sous-ensemble de l’intervalle [ ] de la manière suivante :
. Si est borné et contient plus d’un point,
. Si contient un seul point, est égal à pour cette valeur de .
. Si n’est pas borné ,
. Si n’est pas borné ( ),
La fonction est uniforme et croissante sur et sa fonction inverse est uniforme et croissante sur .
Définissons la fonction sur par la formule
Nous avons alors
La correspondance entre et établit une correspondance entre et un sous-ensemble de .
On voit immédiatement que est monotone par segments et la décomposition canonique de et précisément
Les nombres correspondant aux décompositions canoniques de pour et de pour sont les mêmes. Les fonctions sont du même ordre et ont la même caractéristique .
8. Supposons maintenant que la fonction soit bornée, alors , qui prend les mêmes valeurs, est aussi bornée. Considérons la fonction prolongée tel que nous l’avons expliqué au Nr. 4. Alors est, dans l’intervalle , de même ordre que la fonction . Démontrons plus exactement que
Théorème 5. La fonction est normale, du type minimum et d’ordre ( ) dans l’intersalle .
Si nous considérons la décomposition canonique de pour nous voyons que chaque terme de cette décomposition doit contenir l’un au moins des intervalles ( ), . La fonction est donc normale. Les nœuds ne peuvent être que des points . Le point ne peut être un nœud que si est de monotonie opposé dans les intervalles , par suite de la construction de la fonction . En effet, la fonction est monotone dans les intervalles . La fonction est donc du type minimum en vertu du théorème 1 .
Retenons les formules
9.
Un polynome est toujours monotone par segments. Il est donc toujours normale, et du type minimum. Un polynome de degré est au plus d’ordre ( ).
Théorème 6. Si est un polynome d’ordre et une fonction non-décroissante sur , la fonction est monotone par segments et d’ordre au plus égal à ( ) sur .
En effet, dans le cas contraire, on peut trouver points de tels que la suite
présente variations. Dans cette hypothèse , donc
Il en résulterait que soit d’ordre ( ) au moins, ce qui est impossible.
Le but de ce travail est précisément de démontrer la réciproque de cette propriété.
10. Nous allons démontrer d’abord le
Théorème 7. Toute fonction , monotone par segments, bornée ; normale, du type minimum et de caractéristique dans l’intervalle est de la forme , où est un polynome de degré h et une fonction non-décroissante dans l’intersalle .
Pour démontrer cette propriété soient
les nœuds de la fonction . La fonction est alternativement non-décroissante et non-croissante dans les intervalles de la décomposition canonique. De plus il existe un nombre positif tel que
Nous allons faire maintenant une hypothèse restrictive. Supposons qu’on puisse trouver un polynome de degré ayant tous ses zéros réels et compris à l’intérieur de l’intervalle et ayant les nœuds comme zéros de sa dérivée . Les nombres
.
Posons . Le polynome prend sur toutes les valeurs de sur et une seule fois chacune de ces valeurs. Si nous prenons alors tel que . De même prend dans (fermé ou ouvert à droite suivant que appartient ou non à ) une seule fois chaque valeur de dans . Pour un nous prenons encore tel que . On procède de la même manière dans .
On voit que de cette facton si sont deux points de on a . La fonction est donc non-décroissante.
Déharassons-nous maintenant de l’hypothèse restrictive que les sont les zéros de la dérivée du polynome.
Pour cela considérons un polynome de degré ayant tous ses zéros réels compris à l’intérieur de et soient les zéros de la dérivée . Considérons maintenant la fonction définie au Nr. 6 ( ) et soit
Nous pouvons alors choisir et la fonction non-décroissante tel que
Nous en déduisons
La fonction est encore non-décroissante et le théorème 7 est complètement démontré.
11. Nous pouvons démontrer maintenant notre théorème fondamental
Théorème 8. Toute fonction bornée et d’ordre ( ) sur l’ensemble est de la forme , où est un polynome de degré et une fonction non-décroissante sur .
Pour démontrer cette propriété revenons aux fonctions définies au No. 7. La fonction satisfait aux conditions de théorème 7. Cette fonction étant de caractéristique on peut trouver un polynome de degré et une fonction non-décroissante dans [ ] tels que
Mais
done
et
Il suffit de prendre et le théorème est démontré.
12. L’équation
est vérifiée par une infinité de polynome et une infinité de fonctions non-décroissantes .
On peut facilement voir qu’on peut choisir pour une fonction bornée.
On aurait pu faire la démonstration du théorème 8 directement sans passer par les transformations et et sans utiliser le prolongement, mais nous avons préferé d’établir en même temps quelques propriétés des fonctions monotones par segments.
L’hypothèse que la fonction soit borriée n’est pas nécessaire. Il est facile de voir que le théorème 8 reste vrai pour toute fonction d’ordre qui est bornée sauf peut être aux voisinages des extrémités de qui n’appartiennent pas à .
Ainsi le théorème s’applique, par exemple, à la fonction
qui est d’ordre ( ), mais ne s’applique pas à la fonction
qui est d’ordre ( ).
13. Nous allons compléter un peu le théorème 8 , dans le cas où la fonction est continue. De notre démonstration ne résulte pas qu’on peut alors choisir la fonction continue sur . Nous démontrerons que
Théorème 9. Toute fonction bornée continue et d’ordre ( ) sur est de la forme , où est un polynome de degré et une fonction continue et non-décroissante sur ).
On voit facilement qu’il suffit de faire la démonstration dans le cas où se réduit à un intervalle. En effet, la fonction prolongée est aussi continue. Dans le cas d’un intervalle est normale et du type minimum.
Remarquons, en passant, que le théorème 9 restera vrai pour certaines fonctions non-bornées, comme le théorème 8 (voir le No. précédent).
Démontrons donc le théorème 9 dans le cas où est un intervalle. Si sont les nœuds de la fonction , en examinant la démonstration du théorème 7 , nous voyons que le théorème 9 est exact. si on peut trouver un polynome de degré tel que l’on ait
En passant maintenant par la transformation du No. 6, on voit que le théorème 9 sera complètement démontré si nous démontrons le théorème suivant :
Théorème 10. Etant donnés nombres , tels que
ou
—
on peut trouper un polynome de degré tel que si sont les zéros (supposés tous réels) de la déripée , on ait
14.
Montrons d’abord que le théorème 10 résulte du lemme suivant : Lemme 4. Etant donnés nombres positifs on peut toujours trouper nombres tels que l’on ait
où et est un nombre positif.
1 ) C’est la réponse à une question qui m’a été posé par M. le Prof. S. Stoilo w. C’est d’ailleurs ce problème qui m’a déterminé d’entreprendre l’étude des fonctions d’ordre par segments.
En effet, prenons
et déterminons le polynome du lemme 4. Nous avons
Prenons maintenant suivant que est positif ou négatif. Nous avons
et le polynome
vérifie le théorème 10.
15. Il reste à démontrer le lemme 4. Pour cela nous démontrerons la propriété plus générale suivante, qui d’ailleurs présente un intérêt par elle même,
Théorème 11. Soient donnés :
nombres positifs .
. Une fonction continue et positive dans l’intervalle ouvert ( ).
. Deux points de l’intersalle .
On peut toujours trouper autres points tels que l’on ait :
I. .
II.
où et est un nombre positif.
Le lemme 4 s’obtient en prenant et arbitrairement .
Ocuppons-nous maintenant du théorème 11.
Le théorème 11 est un théorème d’existence. Nous allons lui attacher un théorème d’unicité et un théorème de continuité.
Le théorème d’unicité est le suivant :
Théorème 12. Si les nombres positifs , la fonction positive et continue dans l’intervalle et les points de sont donnés, il existe un seul système de nombres , tels que les conditions I et II du théorème 11 soient verifiées.
Le théorème de continuité s’énonce de la manière suivante :
Thóorème 13. Soient nombres positifs et une fonction continue positive dans l’interpalle ( ). Prenons points de l’intervalle ( ) vérifiant les conditions I et II du théorème 11. Alors si reste fixe, sont des fonctions continues de et ont des dérivées continues par rapport à dans l’intersalle ( ).
Pour faire les démonstrations nous allons procéder par induction complète en démontrant les lemmes suivants :
Lemme 5. Le théorème 13 de continuité est une conséquence du théorème 12 d’unicité.
Lemme 6. Les théorèmes 11 et 12 sont prais pour .
Lemme 7. Le théorème d’existence et le théorème d’unicité pour sont des conséquences des théorèmes 11,12 et 13 pour .
Les théorèmes sont alors complètement démontrés. En effet, si nous supposons qu’ils soient vrais pour nous en déduisons, du lemme 7 , que les théorèmes 11 et 12 sont vrais pour . Le théorème 13 pour résulte alors du lemme 5 .
Pour le théorème 13 résulte des lemmes 5 et 7 .
Il reste à démontrer les lemmes 5,6 et 7 .
16. Première partie de la démonstration du lemme 5. Dans les deux théorèmes 12 et 13 nous supposons, bien entendu, qu’il s’agit des mêmes nombres et de la même fonction .
Pour démontrer la continuité des fonctions par rapport à il faut et il suffit de démontrer que si est une solution du problème exprimé par le théorème 11 et si
(11)
est une suite infinie de solutions du problème telle que
et
on a
(12)
Pour cela il suffit de démontrer que
En effet, si sont les nombres correspondant aux solutions (11), du fait que sont des fonctions continues de , , il résulte que si nous avons (13) tend vers une limite positive pour . Donc (13) est une solution du problème et du théorème 12 il résulte que nous avons (12).
Il reste à montrer que nous avons les inégalités (13), donc que deux points consécutifs ne peuvent pas coïncider. Ceci résulte facilement du lemme suivant :
Lemme 8. Si est une solution du problème exprimé par les conditions I et II du théorème 11 et si , nous apons
où est un nombre indépendant des points . ( dépend uniquement de des nombres et de la fonction ).
Remarquons, en effet, que
Il en résulte que
1) Ce minimum s’obtient en cherchant le polynome , de degré , minimisant l’intégrale
Voir : M. Fujiwara. Uber die Polynome von der kleinsten totalen Schwankung, The Tôhoku Math. Journal, 3, 129-136 (1913).
Il suffit donc de prendre
17.
Deuxième partie de la démonstration du lemme 5. Nous allons montrer que la dérivabilité est encore une conséquence de la continuité et de l’unicité, done de l’unicité seule.
Avec nos notations précédentes, les fonctions sont données par le système d’équations
(14)
Les , donc aussi les premiers membres des équations (14), sont continues et admettent des dérivées partielles continues par rapport aux variables , comme on le vérifie facilement.
Démontrons d’abord la propriété plus générale suivante :
Lemme 9. Si :
sont fonctions continues et admettant des dérivées partielles continues par rapport aux pariables , dans le domaine
. A chaque correspond une solution unique du système
(15)
. Les fonctions déterminées par le système (15) sont continues dans ( ).
. Nous apons
Alors les fonctions sont dérivables au point et ces déripées sont continues dans tout intervalle où la condition est périfiée.
La démonstration de ce lemme résulte facilement du fait que si nous posons et
par suite de l’unicité, la solution du système
est précisément
On achève la démonstration, comme d’habitude, en appliquant, par exemple, la formule des accroissements finis et en remarquant que, par suite de la continuité, pour .
Il en résulté que pour que le lemme 5 soit complètement démontré il suffit de montrer que le déterminant fonctionnel
est différent de zéros, , étant une solution du problème 11.
18. Troisième et dernière partie de la démonstration du lemme 5. Posons
(16)
Nous avons alors
(17)
.
Mais, un calcul simple nous montre que
(18) et on vérifie, en passant, que les dérivées partielles sont continues par rapport aux variables .
On voit que nous avons les inégalités suivantes :
Le déterminant du second membre de la formule (17) peut s’écrire (au signe près),
où les sont positifs et
(21)
(ici d’ailleurs les signes sont valables). Nous obtenons ce résultat en retranchant succesivement les éléments d’une colonne de ceux de la colonne suivante et en tenant compte des inégalités (19).
La propriété que nous cherchons est alors un cas particulier de la propriété plus générale suivante :
Lemme 10. Si les nombres sont positifs et si les inégalités (21) sont périfiées, le déterminant (20) est positif 1 ).
La démonstration de cette propriété est bien simple et peut se faire par induction. Pour la propriété est immédiate. Supposons-la vraie pour et démontrons-la pour . Considérons le déterminant (20) comme fonction de . Le coafficient de est un déterminant analogue d’ordre , donc est positif. Comme le déterminant est une fonction linéaire de il reste à démontrer que ce déterminant est positif si nous prenons le signe dans toutes les formules (21). Mais, dans ce cas, il se réduit au produit de par le mineur du dernier élément de la première colonne. Ce mineur est, au signe près, un déterminant analogue d’ordre . Le lemme 10 est donc démontré.
La propriété reste encore vraie dans l’un des cas :
.
1) Cette propriété est analogue à un lemme, bien connu, de H. Minkowski. D’ailleurs le mineur du dernier élément est précisément un déterminant de Minkowski (si les signes sont valables dans (21)). Voir aussi : G. Scorza, A proposito di un lemma di Minkowski, Boll. Un. Mat. It., 5, 229-231 (1926).
, pourvu que dans (21) l’une au moins des inégalités soit valable.
.
19. Avant de passer à la démonstration des lemmes 6 et 7 , nous allons encore tirer une conclusion du lemme 5.
Lemme 11. Les expressions regardées comme fonctions de sont continues et croissantes.
En effet, substituons dans les fonctions dérivables par leurs valeurs en fonction de .
Le système de définition (1.4) nous montre que
(22)
Il en résulte que l’une des dérivées ne peut s’annuler sans que toutes soient nulles. Mais ce dernier cas est impossible. En effet si
il faudrait que
en étendant les notations (16) et (18) à .
Mais les inégalités (19) se complètent par les suivantes :
Alors le premier membre de (23) se transforme, comme plus haut, en un déterminant positif (déterminant de Mink owski).
De (22) il résulte que les dérivées sont toujours de même signe. Il en résulte que les fonctions sont strictement monotones donc, comme il est à peu près évident, sont croissantes et le lemme 11 est démontré.
00footnotetext: 1) Si nous admettons le lemme de Minkowski, le lemme 10 ainsi que d’autres propriété analogues, comme ou , résultent simplement par récurrence en développant le déterminant suivant la dernière ligne.
20. Démonstration du lemme 6. Pour il suffit d’examiner le rapport . On vérifie facilement que est une fonction de continue, positive et croissante dans et est une fonction de continue, positive et décroissante dans . Il en résulte que le rapport est continue positive et croissante. Mais ce rapport tend vers 0 si et tend vers si . Les théorèmes 11 et 12 en résultent.
21. Première partie de la démonstration du lemme 7.
Supposons que les theorèmes 11,12 et 13 soient vrais pour . Considérons les points , soient , nombres positifs et une fonction continue et positive dans . Si nous prenons un point nous pouvons déterminer les points compris entre , tels que
où et .
La somme est une fonction continue positive et croissante de dans l’intervalle ( ). Cette fonction tend vers 0 lorsque .
Considérons maintenant l’expression
C’est aussi une fonction continue et dérivable de . Calculons sa dérivée par rapport à . Nous avons
Faisant usage de la notation (14) nous avons (ici nous supposons, bien entendu, que est remplacé par ),
(24) .
Nous savons que
Le déterminant du second membre de la formule (24) s’écrit
en employant encore les notations (16) pour et , respectivement et aussi (en prenant au lieu de ). Nous avons encore
Il en résulte, comme plus haut, que le déterminant a le signe de . De (24) il résulte done que
La fonction est donc décroissante. Elle tend évidemment vers zéro pour .
Le rapport
(25)
est donc une fonction continue positive et croissante de dans ( ) et tend vers 0 pour et vers pour . Le théorème d’existence 11 en résulte pour .
22. Deuxième et dernière partie de la démonstration du lemme 7. De ce qui précède il résulte que le rapport (25) atteint la valeur
pour une seule valeur de . Si donc
serait deux solutions du problème, les
constituerait deux solutions du problème pour (en prenant au lieu de ). Mais, par suite de l’unicité,
ce qui démontre la propriété.
23. Par ce qui précède le théorème 9 est complètement démontré.
Pour finir faisons une application.
Une fonction est dite d’ordre sur si sa différence divisée d’ordre , ne change pas de signe sur . Une telle fonction est toujours continue sur tout sous-ensemble complètement intérieur à et ne peut être non bornée qu’aux voisinages des extrémités de qui n’appartiennent pas à . Une fonction d’ordre est toujours monotone par segments et du type minimum. Elle est au plus d’ordre . Nous avons donc la propriété suivante :
Théorème 14. Toute fonction d’ordre n sur est de la forme , où est un polyn : me de degré au plus égal à et une fonction non-décroiscante sur , continue sur tout sous-ensemble complètement intérieur à .
Si est définie dans un intervalle et est convexe d’ordre on peut même choisir une fonction croissante .