T. Popoviciu,Sur la conservation par le polynome d’interpolation de L. Féjer, du signe ou de la monotonie de la fonction,An. Şti. Univ. “Al. I. Cuza” Iaşi Secţ. I (N.S.)8(1962), pp. 65-84 (in French).
SUR LA CONSERVATION, PAR LE POLYNOME D’INTERPOLATION DE L. FEJÉR, DU SIGNE OU DE LA MONOTONIE DE LA FONCTION
PAR
TIBERIU POPOVICIU
à Cluj
§ 1. Conservation du signe de la fonction
1.
Soient
(1)
points de l’axe réelle, une fonction, réelle, de la variable réelle , définie sur un ensemble linéaire contenant les points (1) et considérons le polynome d’interpolation
(2)
correspondant à la fonction sur les noeuds (d’interpolation) (1).
Le polynome (2) (de L. Fejér) est le premier terme du polynome de Lagrange-Hermite
(3)
de degré prenant, avec la fonction et avec sa dérivée , les mêmes valeurs sur les noeuds.
Dans (3) les sont les polynomes fondamentaux d’interpolation de la première et les les polynomes fondamentaux d’interpolation de la seconde espèce correspondants aux noeuds (1). Ces polynomes sont donnés par les formules
Plusieurs auteurs, surtout d’abord L. Fejér [1], ont étudié des cas, très importants pour la convergence des suites de polynomes d’interpolation, où les polynomes (4) sont non-négatifs sur un certain intervalle .
Dans ce premier nous reproduisons, en les complétant un peu, les résultats de L. Fejér [1]. Nous reprenons aussi les cas où les noeuds sont les racines des polynomes orthogonaux classiques de Jacobi, Laguerre et Hermite considérés par L. Fejér [1] et G. Szegö [4].
Ces résultats sont utiles pour mettre mieux en évidence les propriétés que nous étudierons au .
2. Soit un intervalle quelconque. Nous disons que le polynome d’interpolation conserve le signe de la fonction (plus exactement: conserve le signe de la fonction sur l’intervalle ) s’il est non-négatif sur pour toute fonction , non-négative sur les points (1). Il en est toujours ainsi si se réduit à un noeud. Si l’intervalle est non nul 1 ) ou s’il se réduit à un point différent d’un noeud, pour que conserve le signe de la fonction, il faut et il suffit que les fonctions linéaires
(7)
soient non-négatives sur . Dans le cas contraire nous disons que le po lynome d’interpolation ne conserve pas le signe de la fonction (plus exactement: ne conserve pas le signe de la fonction sur l’intervalle ). Dans ce cas il existe au moins un point de sur lequel l’un au moins des polynomes (7) prend une valeur négative.
La formule bien connue
(8)
nous montre que les polynomes (4) ne peuvent s’annuler tous à la fois sur un même point. Il en résulte que si conserve le signe de la fonction il est aussi positif sur pour toute fonction positive sur les points (1). On voit facilement que, sous la même hypothèse, le polynome est non-positif respectivement négatif sur pour toute fonc-
00footnotetext: 1.Donc a une longueur non nulle. De même nous disons que l’intervalle est nul s’il se réduit à un seul point.
(4)
(5)
(où)
tton , non-positive respectivement négative sur les points (1). Il s’agit bien entendu, d’un intervalle non nul. Plus simplement nous pourrions dire que si le polynome dinterpolation conserve la non-négativité, alors il conserve aussi la non-positivité, la positivité et la négativité de la fonction.
3. L’importante notion de points conjugués des noeuds, introduite par L. Fejér, permet de discuter complètement le problème de la conservation, par le polynome , du signe de la fonction.
Les points conjugués des noeuds (1) sont les points
(6)
étant le conjugué du point ).
Le point existe si . Si on peut prendre et alors tous les résultats suivants restent valables en opérant avec le nombre impropre comme d’habitude en analyse mathématique.
Le point ne coïncide jamais avec .
L’inégalité sur est équivalente à l’inégalité
Nous avons
(10)
où l’accent’ au signe signifie que la valeur de l’indice est exclue.
Des inégalités (1) et de (10) il résulte que
donc aussi . Les points sont finis et nous avons si le polynome conserve le signe de la fonction sur l’intervalle .
En particulier, le polynome d’interpolation ne conserve le signe de la fonction sur aucun intervalle infini.
Cette propriété résulte, d’ailleurs, aussi de la formule (8) et du fait qu’aucun des polynomes (4) ne se réduit à une constante 2 ). En effet, l’un au moins de ces polynomes doit tendre vers et l’un au moins vers lorsque ou .
00footnotetext: 1) Lorsque (1) sont les racines du polynome de Tchebycheff les points sont harmoniquement conjugués par rapport aux points .
) Seulement de (8) et du fait qu’un au moins des polynomes (4) ne se réduit pas
4. Si , on a pour tout . Désignons p les valeurs de l’indice pour lesquelles et par les valeurs de l’indice pour lesquelles . Nous avons . D’après (11) il existe de tels indices (donc ). On le voit aussi en remarquant que et que ne peuvent être tous nuls 1 ).
Deux cas peuvent alors se présenter:
4.1. Nous avons
Alors pour que conserve le signe de la fonction sur l’intervalle il faut et il suffit que l’on ait où
Le plus grand intervalle (supposé non nul) sur lequel le polynome conserve le signe de la fonction est l’intervalle .
Dans le cas des noeuds nous avons , qui ne coïncide pas avec un noeud et dans le cas des noeuds nous avons encore , qui coïncide avec un noeud.
4.2. Il existe un indice et un indice tels que
(12)
Dans ce cas il n’existe aucun intervalle , ne se réduisant pas à un noeud, sur lequel le polynome conserve le signe de la fonction,
5. Si l’intervalle est fini, qui peut être toujours supposé fermé, mais quelconque, les résultats de L. Fejér nous montrent que la conservation du signe peut effectivement avoir lieu. Il en est ainsi si les noeuds (1) sont normalement distribués par rapport à l’intervalle . Si , , on dit que les noeuds (1) sont normalement distribués par rapport à , si tous les points appartiennent à l’intervalle et tous les points conjugués sont à l’extérieur de l’intervalle (ouvert) ( ). Il est facile de voir que, dans ce cas, le polynome conserve le signe de la fonction sur .
00footnotetext: 1 ) Car le polynome est de degré et non identiquement nul.
On peut aussi obtenir un résultat en quelque sorte contraire.
Nous avons la propriété
I. Si , on peut construire des systèmes de noeuds (1) tels que e polynome d’interpolation ne conserve le signe de la fonction sur aucun intervalle , nul ou non et ne se réduisant pas à un noeud.
Cette propriété est une conséquence du
Lemme 1. Si et si les noeuds (1) vérifient les inégalités
(13)
le polynome d’interpolation ne conserve le signe de la fonction sur aucun intervalle , nul ou non et ne se réduisant pas à un noeud.
En vertu des inégalités (1) et (13), nous avons
(14)
donc . On voit, de la même manière, que
Il en résulte qu’il suffit de démontrer l’inégalité (12) correspondante, donc l’inégalité
(15)
De (14) on déduit que
donc
(16)
et on démontre de la même manière que
(17)
Compte tenant de (1), (16) et (17), nous avons
ce qui démontre l’inégalité (15), donc le lemme 1.
6. La propriété étudiée plus haut n’est pas vraie pour et pour . Dans ces cas il existe toujours des intervalles , non nuls, sur lesquels le polynome d’interpolation conserve le signe de la fonction.
Q.1. Pour , nous avons
et le polynome diaterpolation conserve le signe de la fonction sur l’intervalle si et seulement si .
6.2. Pour la discussion est un peu plus compliquée et dépend du paramètre , qui reste compris entre 0 et . Nous avons
et nous déduisons que le polynome d’interpolation conserve le signe de la fonction sur l’intervalle si et seulement si:
6.2.1. lorsque .
6.2.2. lorsque . Dans ce cas on a et nous avons , =, respectivement suivant que , respectivement .
6.2.3. I lorsque . Dans ce cas on a et nous avons , =, respectivement suivant que , respectivement .
6.3 Considérons aussi le cas , les noeuds étant symétriquement distribués par rapport à un certain point de l’axe réelle, donc en supposant que . Sur ce cas on peut déjà apercevoir les diverses circonstances qui peuvent se présenter. La discussion dépend du paramètre , qui reste positif. Si nous posons , nous avons et
Nous en déduisons
Si nous posons
les nombres sont les valeurs (uniques) de pour lesquelles on a respectivement. Il résulte alors que l’intervalle se réduit à respectivement suivant que respectivement . Si l’intervalle n’existe pas.
D’autres valeurs remarquables de sont
pour lesquelles on a (et ), (et ), (et ) respectivement.
7. Il y a des cas particuliers importants dans lesquels on peut affirmer l’existence d’un intervalle [ ], non nul, sur lequel le polynome d’interpolation (2) conserve le signe de la fonction.
Désignons par le plus grand des indices et par le plus petit des indices définis au no. 4 . Nous avons et , donc: si , l’intervalle existe et est non (on a ).
L’inégalité est vérifiée s’il existe une fonction définie et non-décroissante sur un intervalle contenant les noeuds et telle que l’on ait
Dans ce cas, d’ailleurs, et lorsque est croissant on a même .
La fonction existe et est même croissante dans les cas suivants :
7.1. Considérons points distincts de l’axe réelle et soient nombres positifs. Alors, pour chaque , il existe un polynome et un seul de degré , de la forme (6), les noeuds (1) étant compris dans l’intervalle ( ) et vérifiant l’équation différentielle
(18)
où et est un polynome de degré .
Dans ce cas on peut prendre
qui est bien une fonction croissante sur l’intervalle ( ).
7.2. Si, en particulier, ) et si nous posons , l’équation différentielle (18) devient
(19) ,
00footnotetext: 1 ) L’hypothèse ’est pas une restriction essentielle. Par une transformation lineare on peut passer à un intervalle fini [ ] quelconque.
les paramètres réels vérifiant les inégalités . Dans ce cas (1) sont les racines des polynomes de Jacobi de degré et de paramètres . Nous avons
donc aussi
7.3. Si (1) sont les racines du polynome de Laguerre de degré de paramètre , le polynome (6) vérifie l’équation différentielle
(20)
Dans ce cas, les noeuds sont positifs et nous pouvons prendre qui est bien une fonction croissante pour . Nous avons .
7.4. Si (1) sont les racines du polynome de Hermite de degré , le polynome (6) vérifie l’équation différentielle
On peut donc prendre qui est aussi une fonction croissante. Dans ce cas .
7.5. Nous sommes encore dans le cas précédent si les noeuds sont équidistants. Soient les noeuds.
La formule
nous montre que la suite est croissante. Nous avons, dans ce cas, et
8.
L. Fejér a étudié [1] très en détail le cas des polynomes de Jacobi, en précisant les extrémités de l’intervalle . Ainsi, lorsque les inégalités
(21)
sont vérifiées, on peut obtenir un résultat plus précis. En effet, si nous supposons que
nous avons
(22)
où
Remarquons que est une fonction linéaire de et de . Il en résulte que si reste compris entre le plus petit et le plus grand des nombres . Mais, compte tenant de . On en déduit facilement que nous avons pour .
Nous avons donc et la formule (22) et les résultats du no. 4 nous montrent que .
Les résultats précédents peuvent avoir lieu aussi pour d’autres valeurs des paramètres , par exemple pour . Si , , l’équation différentielle (19) est encore vérifiée par un polynome de degré ayant toutes ses racines réelles et distinctes. Les (1) sont alors les racines d’un polynome de Jacobi généralisé de degré [5]. Mais, ces racines sont des fonctions continues de et les résultats précédents restent valables si diffèrent suffisamment peu de -1 . Si et si , on a et on en déduit que si sont suffisamment près de -2 nous sommes dais les conditions du lemme 1 et l’intervalle n’existe pas.
9. Dans le cas des racines du polynome de Laguerre on peut aussi préciser les nombres . En étudiant la fonction , on trouve facilement que
Mais, ces délimitations sont assez peu précises. En effet, en faisant , nous en déduisons seulement , quoique, comme nous le verrons plus loin, ici c’est l’inégalité stricte qui est valable. L’équation différentielle (20) a comme solution un polynome de degré ayant toutes ses racines réelles et distinctes pour .
Pour nous sommes dans le cas des polynomes de Laguerre généralisés de paramètre . Si , on a et
sont les racines du polynome de Laguerre de degré et de paramètre 1. Si , on a et . Lorsque tendent vers 0 tous les deux et les vers les racines (positives) du polynome de Laguerre de degré et de paramètre 2 .
Pour , nous avons
Nous avons donc .
Pour , nous avons
qui est négatif pour et positif pour . Pour , hous avons
et nous déduisons que
L’intervalle existe donc et est non nul pour . On peut facilement voir que la longueur de cet intervalle tend vers 0 pour .
Disons aussi un mot sur le cas où (1) sont les racines du polynome d’Hermite de degré . Dans ce cas la fonction a un maximum égal à pour et un minimum égal à pour . On en déduit que .
§2. Conservation de la monotonie de la fonction
10.
Nous dirons que le polynome d’interpolation (2) conserve la monotonie de la fonction (plus exactement: conserve la monotonie de la fonction sur l’intervalle ) s’il est non-décroissant sur pour toute fonction non-décroissante sur les points (1). Pour qu’il en soit ainsi il faut et il suffit que l’on ait sur pour toute fonction non-décroissante sur les points (1). L’intervalle peut être supposé non nul
De la formule (8) il résulte que
(23)
identiquement en . La transformation d’Abel nous donne alors
.
Nous en déduisons que le polynome d’interpolation conserve la monotonie de la fonction si et seulement si
(24)
sur , ou bien si et seulement si
()
sur .
Si les conditions (24) ou (24’) ne sont pas vérifiées, on peut dire que le polynome d’interpolation (2) ne conserve pas la monotonie de la fonction. On peut alors trouver une fonction non-décroissante sur les points (1) telle que le polynome (2) soit décroissant sur un sous-intervalle (non nul) de .
Le polynome est de degré effectif , d’où il résulte que si conserve la monotonie de la fonction, il est croissant sur pour toute fonction croissante sur les points (1). On démontre facilement que, sous la meme hypothese, est non-croissant respectivement decroissant sur pour toute fonction non-croissante respectivement décroissante sur les points (1). On peut donc dire que si conserve la non-décroissance de la fonction, il conserve aussi la noncroissance, la croissance et la décroissance de la fonction.
11. Nous avons la propriété suivante:
II. Le polynome d’interpolation ne conserve la monotonie de la fonction sur aucun voisinage 1 ) d’un noeud.
En effet, le polynome a toutes ses racines réelles et plus exactement le point comme racine simple et les noeuds comme racines doubles. Il en résulte que la dérivée du polynome s’annule, en changeant de signe, sur les points . On voit de même manière que la dérivée du polynome s’annule, en changeant de signe, sur les points . La propriété II résulte alors, en tenant compte de la première condition (24) et de la dernière condition ( ).
00footnotetext: 1 ) Par un voisinage d’un point nous entendons un intervalle contenant ce point comme point intérieur.
Nous avons et le polynome est croissant sur les intervalles (et est décroissant sur les mêmes intervalles). Il en résulte que le polynome d’interpolation ne peut conserver la monotonie de la fonction sur un intervalle que si , mais cette condition nécessaire n’est pas, en général, suffisante.
12. Nous avons aussi la propriété suivante:
III. Il existe un voisinage droit de et un voisinage gauche 1 ) de sur lesquels le polynome d’interpolation conserve la monotonie de la fonction.
Il suffit de démontrer que dans les voisinages considérés les polynomes sont décroissants.
Considérons le polynome . C’est le polynome de Lagrange Hermite (3) qui prend la valeur 1 sur les noeuds , la valeur 0 sur les noeuds et dont la dérivée s’annule sur tous les noeuds. est de degré effectif et sa dérivée a toutes ses racines réelles et simples. Ces racines sont les noeuds et, d’apres le théorème de Rolle, une racine simple dans chacun des intervalles
Le polynome est alternativement croissant et décroissant dans les intervalles déterminés par les racines de .
Sur l’intervalle est évidemment décroissant, il en résulte donc qu’il est décroissant dans un voisinage droit de et dans un voisinage gauche de .
La propriété III est donc démontrée. Un examen plus attentif de l’allure des polynomes permet de préciser encore davantage la pro-
) Un voisinage droit (gauche) de est un intervalle (non nul) ayant le point comme extrémité gauche (droite).
priété. Désignons par les racines différentes des noeuds du polynome . Posons
Nous avons alors , .
Désignons par l’intervalle lorsque et posons aussi . Alors le polynome d’interpolation conserve la monotonie de la fonction sur tout intervalle qui existe, en particulier donc sur chacun des intervalles .
Remarque. Le polynome est analogue au polynome de LagrangeHermite de degré qui prend la valeur 1 sur les noeuds , , la valeur 0 sur les noeuds et dont la dérivée s’annule sur les points . Le polynome intervient dans la démonstration du célèbre théorème de séparation de Tchebycheff-Markoff-Stieltjes (voir, par exemple, G. Szegö [5]).
Le polynome est croissant pour , le coefficient de dans ce polynome est donc positif. Cette propriété s’exprime par les inégalités
Par suite de (8), pour , le premier membre de cette formule est égal à 0 .
13. Nous allons examiner le problème de l’existence des intervalles (pour ) dans quelques cas particuliers.
Nous avons le
Lemme 2. Si
il existe un voisinage du point sur lequel le polynome d’interpolation (2) conserve la monotonie de la fonction.
La propriété résulte immédiatement de la continuité des polynom et de la condition (24).
Nous avons aussi le
Lemme 3. Si nous avons
(25)
et si la suite
(26)
présente une (seule) variation de signe, on peut trouver un voisinage du point sur lequel le polynome d’interpolation (2) conserve la monotonie de la fonction.
En effet, soit le plus grand indice pour lequel . Nous avons et
Compte tenant de (23) on en déduit
et le lemme 3 résulte du lemme 2 .
14. En utilisant les résultats précédents, examinons la conservation de la monotonie dans un voisinage d’une racine de la dérivée du polynome .
Supposons donc que soit une racine du polynome et formons la suite (26) pour . Compte tenant de et , nous avons
(27)
(28)
Compte tenant de (11) et on déduit que les conditions (25) sont toujours vérifiées. Mais, la suite
présente exactement une variation de signe. Il en résulte que
IV. Si est une racine de la dérivée du polynome (6) et si
(29)
il existe un voisinage du point sur lequel le polynome d’interpolation conserve la monotonie de la fonction.
15. De l’analyse précédente il résulte que, pour et pour , la propriété suivante este vraie
V. Le polynome d’interpolation conserve la monotonie de la fonction dans un voisinage convenable de chacune des racines de la dérivée du polynome .
D’ailleurs, si , nous avons
et le polynome d’interpolation conserve la monotonie de la fonction sur l’intervalle si et seulement si .
Pour la propriété V résulte du fait que, dans ce cas, la suite (26) pour présente exactement une variation de signe, quelle que soit la valeur de . On peut, d’ailleurs, démontrer par un calcul direct que , dans ce cas.
Considérons encore le cas , les noeuds étant symétriquement distribués, donc . Sans restreindre la généralité du problème, on peut prendre , où est un nombre positif . En effet, par une transformation linéaire, qui conserve toujours la monotonie et la symétrie de la distribution, on ramène le cas des noeuds quelconques au cas .
Un calcul, qu’il est inutile de reproduire en détail, nous donne
.
Les racines du polynome sont et .
Pour et pour nous avons
et pour nous avons
Dans tous les cas les conditions du lemme 2 sont vérifiées pour .
Il en résulte que la propriété V est vraie aussi lorsque et les noeuds sont symétriquement distribués 1 ).
16. En vertu de (7) nous avons
Mais, lorsque les noeuds sont normalement distribués par rapport à un intervalle (no. 5), nous avons donc les inégalités (29) sont, à fortiori, verifiées. Nous avons donc la propriété suivante
VI. Si les noeuds sont normalement distribués par rapport à un intervalle, le polynome d’interpolation conserve (le signe et aussi) la monotonie de la fonction dans un voisinage convenable de chacune des racines de la dérivée du polynome .
Examinons aussi les inégalités (29) dans le cas où les noeuds sont les racines du polynome de Jacobi de degré . Puisque , dans ce cas nous avons
qui reste compris entre
On voit que si , les inégalités (29) sont vérifiées. Il est facile de voir que ces inégalités sont vérifiées même si . Il en résulte que nous avons la propriété suivante
VII. Si les noeuds sont les racines du polynome de facobi de degré n et dont les paramètres vérifient les inégalités , le polynome d’interpolation conserve la monotonie de la fonction dans un voisinage convenable de chacune des racines du polynome .
§3. Sur quelques autres problèmes de conservation de l’allure de la fonction par interpolation
17. On peut chercher à étudier la conservation de la convexité (habituelle, c’est-à-dire d’ordre 1) de la fonction par le polynome d’interpolation (2).
1 ) Le problème si la propriété est ou non vraie en général reste à résoudre.
La définition de la conservation par de la non-concavité d’ordre 1 est tout à fait analogue a la definition de la conservation de la non-négativité et de la non-décroissance [3].
Si le polynome d’interpolation conserve la non-concavité d’ordre 1 il doit conserver aussi la non-convexité d’ordre 1. Mais, la fonction est en meme temps non-concave et non-convexe d’ordre 1 sur n’importe quel intervalle. La fonction doit donc se réduire à un polynome de degré 1. De (3) il résulte alors que le polynome doit être de degré 1 . C’est impossible puisque le coefficient de dans ce polynome est égal à
(30)
Nous avons donc la propriété suivante:
VIII. Le polynome d’interpolation ne peut conserver la nonconcavité d’ordre 1 de la fonction sur aucun intervalle (non nul).
18. Lorsque nous étudions la conservation par du signe, de la monotonie ou de la convexité d’ordre 1 , le fait que nous supposons la fonction définie seulement sur les points (1) n’est pas une restriction essentielle. En effet, une telle fonction peut toujours être prolongee sur nimporte quel ensemble lineare contenant les points . Si donc nous supposons que l’ensemble est quelconque, nous retrouvons les résultats précédents.
19. Enfin, nous pouvons poser les mêmes problèmes de conservation de l’allure de la fonction pour des polynomes d’interpolation différents du polynome (2) de . Fejér. Dans un travail antérieur nous nous sommes occupé, en ce sens, du polynome de Lagrange [3].
Considérons ici le polynome d’interpolation de G. Grünwald [2]
qui est étroitement lié au polynome (2) de Fejér.
Le polynome d’interpolation conserve (évidemment) le signe de la fonction sur tout intervalle. Pour qu’il conserve aussi la monotonie il faut qu’il se réduise à une constante pour la fonction . Mais, est un polynome de degré effectif puisque le coefficient de est encore égal à (30). Nous avons donc la propriété suivante:
IX. Le polynome d’interpolation ne peut conserver la monotonie de la fonction sur aucun intervalle (non nul).
Cluj, le 20 novembre 1961
BIBLIOGRAPHIE
1.
Fejér Leopold - Lagrangesche Interpolation und die zugehörigen konjugierten Punkte. Math. Annalen, 106, 1932, 1-55.
2.
Grunwald G. — Qn the theory of interpolation, Acta Math. 75, 1943, 219-245.
3.
Popoviciu T. - Sur la conservation de l’allure de convexité d’une fonction par ses polynomes d’interpolation, Mathematica, 3 (26) (sous presse).
p. - Uber gewisse Interpolationspolynome, die zu den Gacobischen und Laguer4. Szegö G. -schen Abszissen gehören, Math. Zeitschrift, 35, 1932, 579-602. Orthogonal Polynomials, 1959.